[avatar user= »yaaahhh » size= »thumbnail » align= »left » link= »https://rootsisrael.com/auteur/yoram/ » target= »_blank »]YORAM SALAMON[/avatar]
132 morts.
Bizarrement, ou naïvement, comme on reproduit certains gestes superstitieux pour conjurer le mauvais sort, en France on pensait il y a presqu’1 an, qu’en mettant sur sa photo de profil Facebook ou sur le fond d’écran de son bureau « je suis Charlie », les méchants ne reviendraient plus.
Mais en fait non…ça n’a pas marché.
Après les attentats de janvier dernier, Daesh Dieu en 1, n’est pas comme tout le monde l’espérait, retourné laver son linge sale en famille….c’est à dire sur le champ de bataille syrien ou irakien, enfin loin là bas…là où ça ne tâche pas Paris.
Non Paris s’est bien faîte massacrée…massacrée en bonne et due forme. Massacrée dans sa joie de vivre, dans sa quiétude, dans son insoutenable légèreté de l’être.
Paris l’insouciante, n’a pas eu le temps de se préparer au pire…Pas de bombardements, pas de massacres, pas de viols, pas d’égorgements pour prévenir, s’habituer, se préparer.
Enfin si en janvier 2015…mais c’était seulement des journalistes, des flics et des juifs… des gens dont c’est le métier, ou l’habitude de mourir …
Du coup Daesh a rempli les trous, comblé les vides, et a visé cette fois des « innocents » (© Raymond Barre – attentats de Copernic en 80), des gens, des djeun’s, des amoureux, des noirs, des blancs, des arabes, des monsieur et madame tout le monde…
Daesh donc avait prévenu qu’il ne s’arrêterait pas là. Mais on a tourné la tête de l’autre côté en feignant de ne pas entendre et en sifflotant. C’est ce que moi j’ appelle la politique du « Jusqu’ici tout va bien ». Comme le disait Hubert dans la Haine il y a 20 ans : « C’est l’histoire d’une société qui tombe, et qui au fur et à mesure de sa chute, se répète sans cesse pour se rassurer : jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien ».
Mais depuis vendredi dernier, la France est en train de comprendre que tout ne va pas bien, que Daesh est plus que déterminé à aller jusqu’au bout de sa « logique de la fin des temps« , pour citer les mots de Jean-Pierre Filiu, spécialiste de l’Islam contemporain.
La politique de Daesh n’est pas une réaction aux valeurs dégradantes de l’Occident ou aux mauvais musulmans …La logique de Daesh c’est l’Apocalypse.
Ca ne s’invente pas, leur idéologie est basée sur un manifeste nommé « l’administration de la sauvagerie ». C’est écrit, c’est là partout sur internet, et il tient en 3 points.
- Favoriser le chaos dans les pays musulmans en déchaînant la violence afin d’épuiser les structures étatiques, et ainsi faire perdre la confiance dans les gouvernants, qui répondront à la violence par une violence supérieure. C’est ce chaos qui permettra le soutien populaire et verra s’imposer l’EI comme la seule alternative.
- Internationaliser le conflit, notamment par le terrorisme dans les pays occidentaux. Exercer un harcèlement continu, une provocation permanente des pays en paix, et créer la paranoïa et la psychose au sein des populations.
- Proclamer le Califat
Pour édifier une nouvelle société, il faut faire tomber la précédente, c’est comme ça que fonctionne l’histoire…ou l’Histoire…La théorie du chaos est la réponse de Daesh pour le rétablissement du Califat. Le Chaos, la destruction et la construction par dessus d’un régime totalitaire.
Ce qui a eu lieu à Paris ne s’arrêtera donc pas. Ni à Paris, ni ailleurs.
Mais sérieusement…les bombardements à des milliers de kilomètres d’ici ne peuvent pas vraiment être la réponse pour empêcher de nouveaux attentats. C’est plutôt même le contraire. Plus tu les bombardes, plus plus tu fais grossir leurs rangs. Ils n’attendent que ça, on l’a dit plus haut. La surenchère de la violence fait exactement leur jeu.
De plus, les terroristes, outre les vies qu’ils ont volées, sont en train de réussir autre chose, quelque chose de bien plus vicieux, et dangereux. Les enjeux des attentats de Paris n’étaient pas que de créer le traumatisme, mais d’entraîner une paranoïa permanente.
L’ennemi est à présent partout.
Ton voisin dans une terrasse de café, le passant qui te regarde un peu trop bizarrement à ton goût, ou cet homme qui attends sur le quai du métro depuis plus de 10 minutes.
Les djihadistes terroristes n’étaient pas en djellaba, ils étaient habillés comme toi et moi. Non identifiables par leurs apparences. De quoi jouer sur les plus grandes angoisses, les plus grandes phobies.
L’Etat Islamique est en train d’appliquer son idéologie politique à la lettre. Elle le fait par intraveineuse d’un sentiment diffus, celui d’une sécrétion insidieuse qui vise à mettre dos à dos les communautés, et notamment à stigmatiser l’ensemble de la communauté musulmane en l’obligeant à se mettre dans une position de justification permanente. Exactement ce qu’à fait à mon sens cet irresponsable de Kassovitz qui par ses mots, déclare que pèse sur chaque musulman une présomption de culpabilité : « Mes amis musulmans, descendez dans la rue, et faîtes vous entendre. Sinon vous méritez l’amalgame dont vous êtes victimes ». Le #NotInMyname devient une obligation sous peine de lynchage.
C’est exactement ce genre de déclarations qui amène la peur, le repli sur soi, le communautarisme, et alimente encore plus lourdement les réseaux de djihadistes.
Que les musulmans ressentent eux le besoin de s’exprimer à ce sujet, de se désolidariser, personne ne leur jettera le bâton, bien au contraire, car dans un moment comme celui-ci nous avons tous besoin d’être rassurés sur les intentions des gens avec qui l’on vit, quels qu’ils soient. Un exutoire oui, pas une condamnation !
Evidemment que l’on doit appliquer une politique de la fermeté, du contrôle, de la réaction. Enfermer les fondamentalistes, les anéantir…oui, mais pas que.
Si on ne fait rien en amont, on arrêtera oui, mais toujours plus. On enfermera oui, mais toujours plus. Il faudra dans quelques années des prisons plus grosses que 10 stades de France pour enfermer tous les extrémistes.
La répression n’est jamais une solution suffisante, car elle ne fait que mettre un pansement sur un mal sans le soigner.
La vérité c’est que les gars qui ont fait les attentats sont tous français…ils ont tous la nationalité française. Ils ont grandi en France, et on été éduqués par le système français.
Et il est là le vrai bombardement à opérer. On envoie des soldats surarmés et surentrainés en Syrie pour faire le nettoyage, on largue des tonnes de bombes, mais ceux qu’on doit vraiment former, armer, rendre redoutables, ce sont les professeurs, ceux-là même qui officient dans ceux qu’on a identifié depuis un moment déjà comme les territoires perdus de la République.
Parce que c’est exactement dans ces zones qu’on recrute pour faire des attentats à Paris.
Il est temps aujourd’hui d’y revoir le modèle d’éducation, d’arrêter de faire dans le colmatage, et d’envoyer au front non pas des professeurs pas ou peu entrainés, mais des commandos, des Robocops de l’éducation, chargés de veiller à ce que les valeurs fondamentales qui constituent notre démocratie soit intégrées de manière profonde, surtout là où les parents sont démissionnaires. Des grands frères, des super nannies pas seulement en Réality Show, mais pour de vrai. Chaque professeur doit avoir désormais une obligation de résultat et non pas faire de son mieux. Et pour ça, il faut que les budgets de l’Education Nationale explosent, que les écoles deviennent des Fort Alamo des valeurs républicaines…
Il faut arrêter de livrer en pâture des troupeaux de professeurs à des classes entières de mômes de 8 ans qui lorsque tu les interroges pensent qu’un attentat est une juste réponse au non respect de l’Islam, ou que les juifs en font des caisses avec leur Shoah, etc etc.
Des classes et des classes de gars qui lorsqu’ils écoutent Dieudonné trouvent enfin une caisse de résonnance à leur frustration. Des classes et des classes de gars dont la désolation psychologique et intellectuelle constituent le terreau de recrutement des barbus djihadistes.
Ce sont leurs (manque d’) idées qu’il faut combattre, car ce sont elles qui ont tué à Paris ce week-end.
On ne connaît pas très bien les chiffres, et ceux annoncés varient : 500, 1500, 4000 . Combien déjà exactement sont partis se former là bas ?
Sans compter ceux qu‘on n’a pas besoin de faire partir pour en faire des terroristes.
Empêcher des gosses de devenir des terroristes…il est là le combat.
Mais jusqu’ici tout va bien non ?
(174)