Journalistes du Monde, comme d’habitude, vous êtes édifiants. Sous couvert d’objectivité, misant sur le côté expert pointilleux du “décodeur”, vous prenez un parti pris bien tranché, grâce à un jeu sémantique bien rôdé et des omissions choisies. La désinformation en douceur, quoi. Je peux jouer au décodeur, moi aussi ?
– Pourquoi ne montrer sur la carte que le territoire de Gaza, avec vos ronds rouges bien dramatiques, et pas le territoire israélien victime de roquettes (environ 1 toutes les 10 minutes) ?
– Pourquoi n’évoquer que les circonstances horribles de la mort du Palestinien brûlé vif, et omettre les circonstances de la mort des trois adolescents israéliens (10 balles dans leurs corps, les rires glaçants entendus dans les enregistrements) ?
– Sur quelles données mystérieuses vous basez-vous pour parler de « quelques » roquettes, comme de jolies petites pierres rondes bien polies, bien inoffensives, en contraste saisissant avec les horribles « raids » israéliens (accompagnés de rires sadiques, non ?)
– Comment les terroristes du Hamas deviennent, par la magie de votre plume, des « combattants » ? Oubliez-vous qu’ils jurent, dans leur Charte de 1986, la destruction d’Israël et l’annihilation de sa population juive ? Enfin, par quelle déduction ingénieuse, par quelle fine analyse des « faits », êtes-vous parvenus à définir que la mort de sept d’entre eux soit la cause de cent tirs de roquettes, dont le seul but est de toucher la population civile ? N’avez-vous pas jugé utile de montrer cette fois-ci un contraste interpelant, à savoir, la légitimité des cibles des différents belligérants : alors que les uns visent les infrastructures et responsables militaires du Hamas (qui, s’ils ne forment pas une armée officielle, prennent cependant les armes et perdent ainsi leur immunité de civils), les autres ciblent délibérément des civils, ce qui constitue le premier crime de guerre en droit international ?
– Pourquoi évoquer l’insoutenable chiffre des morts Palestiniens sans expliquer qu’ils se positionnent en boucliers humains, chair à canon, martyrs tellement utiles médiatiquement à leurs tortionnaires de dirigeants ?
– De quel droit mettez-vous en contraste les morts Palestiniens et les blessés Israéliens de manière aussi biaisée ? Pourquoi ne pas évoquer l’action du Dôme de Fer qui, grâce à des radars sophistiqués, identifie la trajectoire des missiles et les intercepte en l’air ? Cela explique le peu de dégâts humains côté israélien ; sans lui, les morts innocents se compteraient sans doute en centaines. Devrait-on s’excuser de survivre ?
– Dans votre jolie carte représentant la superficie de Gaza par rapport à celle de Paris, pourquoi ne pas montrer, par le même jeu de proportionnalité, la taille du territoire israélien touché par les tirs de roquettes ?
– Ah, et on dit TIR de roquette, et non « lancer », hein. La sémantique utilisée est effrayante. Pensez-vous qu’ils prennent un joli lance-pierre construit avec deux morceaux de bois et un élastique ? Cette image a le côté pathétique, presque mignon, du terroriste dans « Les sous doués passent le Bac » qui se retrouve avec la mauvaise couscoussière, remplie de pétards, et qui crie quand même, pour la forme : « Notre peuple vaincra ! ». Alors que non, les Fajr-5 iraniens, qui peuvent atteindre le lit où je dors, contiennent jusqu’à 90 kilos d’explosifs.
Le débat est déplacé. Les populations ne sont pas les unes contre les autres et les deux méritent de vivre paisiblement. Sans blocus, sans roquettes, sans maisons détruites, sans enfants traumatisés ou morts. Mais une des deux populations est utilisée, manipulée, par des dirigeants qui détournent les aides humanitaires, les envoient à la mort et, par leurs actions terroristes, maintiennent un double blocus sur leur territoire. L’empathie envers les populations qui souffrent, on l’a tous. Enfin, j’ose l’espérer. Mais les bons sentiments ne doivent pas nous rendre aveugles !
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