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Jeudi dernier, le 11 décembre, le Sénat, de droite, a voté le texte portant sur la reconnaissance d’un Etat palestinien, déjà adopté par l’Assemblée nationale, elle, de gauche.
Le Parlement français n’a pas créé pour autant cet Etat palestinien: il n’y aura aucune conséquence du côté palestinien.
Côté français.
Si sur le plan international le vote d’un texte non-contraignant pour le gouvernement n’a aucune portée, c’est que sa raison d’être est de l’ordre de la politique interne.
Je suis sûr que parmi vous, mes lecteurs, plusieurs ont constaté la dérive électoraliste du système démocratique. C’est assez classique, car quand il existe une rupture entre la classe politique et le peuple, comme c’est le cas en France, les professionnels de la politique sont obligés de fidéliser une partie de l’électorat, par crainte de perdre leur gagne-pain.
Pour citer le grand philosophe/sociologue/animateur/speakerine Aymeric Caron: « il faut regarder les chiffres » . En effet, 70% des ouvriers, qui sont au PS et au PC, ce qu’un rabbin sépharade est au Shas, ne votent pas, et un quart de ceux qui votent, le font pour le FN.
Ainsi, selon la logique socialiste, la condition de classe ne définit plus le vote. Et là, c’est le drame, parce qu’il a fallu trouver une nouvelle base électorale assez solide pour un parti de gouvernement.
De la lutte anti-raciste des années 1980, nous sommes passés à la forme la plus cynique du racisme.
J’admets, il faudrait que je développe.
Que dit un socialiste à un chrétien et à un juif à propos de leurs religions ?
En bon rationnel, il va les écarter, et s’il a du temps à tuer, il démontrera certaines absurdités…Mais, curieusement, l’islam mérite un autre traitement.
Si l’on faisait un concentré de la sagesse socialiste actuelle, ce serait: « il ne faut absolument pas provoquer les musulmans, notamment en faisant des amalgames et en stigmatisant, ce qui serait un racisme avéré.»
Et personne ne fait remarquer que c’est la formulation la plus raciste que l’on puisse avoir pour parler d’un groupe humain.
En premier lieu, quand on dénonce les travers d’une religion, on ne provoque personne, on résiste à l’obscurantisme. Il y en a dans toutes les religions, sinon ces dernières feraient appel à la raison et non pas à la foi.
Deuxièmement (je suis sûr que beaucoup d’entre vous ont déjà eu cette réflexion): qui fait des amalgames ?
Celui qui jette un cocktail molotov sur une synagogue à Paris au cri d’ «Allah wakbar!»?
Certainement.
Ceux qui pensent que les Français musulmans ne méritent pas d’entendre un discours laïc et rationnel ?
Sans aucun doute.
Ceux qui dénoncent des dogmes religieux belliqueux et médiévaux à l’heure des missiles balistiques?
Rien n’est moins sûr.
Troisièmement, la fameuse stigmatisation des musulmans en France existe bel et bien, mais c’est d’abord le fait de la classe politique, et notamment celle de gauche.
Car, quand la ghettoïsation sociale s’accompagne d’un repli ethnico-religieux, cela attente à la cohésion de la communauté nationale, même si c’est pratique pour le système clientéliste mis en place par les partis.
Evidemment, l’irresponsabilité des politiciens a laissé un boulevard aux fondamentalistes, qui ont pu convaincre ou terroriser une partie du peuple abandonné.
Enfin, ceux qui confondent religion et ethnie sont racistes, surtout quand ils entretiennent cette confusion.
Les socialistes en particulier, et la gauche en général, sont ceux qui considèrent que des français, parce que musulmans, vont voter pour eux, alors que l’actuelle majorité a échoué sur les plans écologique, économique, social, et international, simplement parce qu’elle a voté un texte sans valeur contraignante sur la Palestine.
Si tenter de manipuler aussi vulgairement une partie de la population en fonction de son origine n’est pas du racisme, qu’on m’explique ce que c’est.
Les Français n’ont pas le droit à la vérité sur le Proche-Orient, il ne faut pas perdre des voix et faire monter les extrêmes, pensent nos dirigeants politiques.
Les musulmans, spécifiquement, ne doivent pas pouvoir changer une opinion censée les définir; on ne peut donc pas leur montrer la réalité d’un conflit, certes complexe, mais de faible intensité où il n’y a nulle trace de génocide, d’apartheid, de persécution religieuse, ou d’enfants visés par des snipers… Israéliens.
Maintenant, vous savez pourquoi j’ai évoqué le racisme le plus cynique pour parler d’une politique soit-disant «pro-arabe».
Côté israélien.
Les Israéliens n’allaient tout de même pas remercier la France de servir de faire-valoir pour ses problèmes politiques internes.
Je ne pense pas être le seul qui aurait bien rigolé si la Knesset avait voté la reconnaissance, en tant qu’Etats souverains, de la Laponie, du Pays Basque, de la Catalogne, de la Savoie, de la Corse, de la Bretagne et de tous les départements d’outre-mer. Les Britishs pourraient apprécier l’humour d’une ambassade israélienne en Ecosse et d’une autre au Pays-de-Galle.
Cependant, ce vote français me pousse à penser deux choses concernant la politique israélienne, et c’est moins marrant. Si autant d’Etats européens ont pris cette initiative, il faut donc supposer que les Etats-Unis n’ont pas mis leur veto de façon formelle. Sans un accord, au moins tacite, de la part de l’Administration Obama, personne n’aurait parlé de «pression sur le gouvernement Netanyahu».
On peut alors s’attendre à un vote de l’ONU.
Or, pour qu’Israël garde une longueur d’avance sur le plan stratégique, il faudrait que son gouvernement reconnaisse unilatéralement un Etat palestinien avant un vote qui semble se rapprocher, mettant ainsi
Abbas et le Hamas face à leur responsabilité et à leur peuple.
Tant qu’un gouvernement palestinien, démocratiquement élu, n’accepte pas de reconnaître en Israël un Etat juif, ayant Jérusalem pour capitale, tout en changeant les contenus des manuels scolaires et universitaires palestiniens, en libérant les médias et en modifiant en substance les structures sociales palestiniennes, il n’y a aucune raison pour qu’Israël accepte le principe même d’une discussion portant sur le tracé de frontières définitives.
En attendant, chaque attentat, chaque roquette, sera un casus belli. On peut d’ores et déjà trouver un nom à cette guerre: la guerre des six heures.
Malheureusement, c’est à ce point qu’intervient le second élément auquel la manœuvre politicienne des élus de gauche m’a fait penser.
Israël est en période électorale, et la défaillance du personnel politique n’est pas moindre de ce qu’elle est en Europe.
En Israël, la gauche pourrait diriger le pays si elle arrêtait de faire croire qu’elle croit en l’existence d’une frange modérée au pouvoir chez les Palestiniens. Au lieu de se concentrer sur les problèmes sociaux et écologiques, et d’essayer de contrer le poids des religieux sur la politique, le front du centre-gauche mené par Buji Herzog, préfère le libéralisme financier et critiquer le pseudo radicalisme de Bibi.
Et que dire de la droite? Liberman, feint d’imaginer qu’Israël est une super-puissance, Netanyahu préfère gouverner avec les religieux plutôt qu’avec des concurrents qui le seront dans 10 ans. Kah’lon, parce qu’il avoue son incompétence et son manque d’opinion politique, passe pour un pragmatique plein d’humilité.
Quant à Bennet; ah’i, ah’oti, toi qui me lis en cachette, sache que lorsqu’un politicien pleinaux as te prend par les sentiments c’est qu’il compense par la flagornerie son manque de conviction, quand il ne camoufle pas des objectifs inavouables.
Je ne dis rien de Lapid, aussi décevant que transparent.
Si quelques électeurs du Shas sont arrivés à lire jusqu’à la fin ce papier et qu’ils son outrés par mes propos, qu’ils se souviennent ce quoi à ils pensaient quand au début de l’article j’évoquais la susceptibilité des islamistes.
Rien de neuf, et donc pas de bonnes nouvelles.