La valse des scandales

Les médias israéliens ressemblent ces temps-ci à des journaux à scandales. Difficile de croire que nous sommes en pleine campagne électorale ! Les Israéliens s’apprêtent à choisir le parti qui les représentera à la Knesset dès le 17 mars prochain, mais les débats semblent bien éloignés des programmes des concurrents…

Le premier est le projet qu’a Bibi d’aller faire un discours au Congrès américain un mois et demi avant les élections. OK, il répond à une invitation du parti républicain, mais les démocrates s’y opposent : cela contredirait le protocole et serait une concurrence déloyale envers les opposants politiques de Bibi. Sa visite aurait pour objet de parler d’éventuelles sanctions contre l’Iran. Déjà, il ruine le soutien bipartisan des américains pour Israël, mais en plus, vous ne trouvez pas ça bizarre que le dirigeant d’un pays étranger vienne donner des leçons au Président des Etats-Unis, le chef du monde libre, chez lui ?

Passons ensuite à un pur scandale de détournement de fonds publics : le désormais célèbre ‘Bottlegate’. Cette histoire frise dangereusement le ridicule : d’abord, une consommation excessive d’alcool au bureau du Premier Ministre – 4300 shekels par mois, l’équivalent d’un salaire pour beaucoup d’israéliens, et encore, on n’a pas comptabilisé la consommation à la résidence… En plus de Sara Netanyahou qui apporte régulièrement les bouteilles à la consigne et garde l’argent alors qu’il revient à l’Etat.

Pour finir, un scandale, que dis-je, deux ! se jouent sur le terrain de financement des partis politiques. Selon la loi des Finances de 1999, les fonds nécessaires aux campagnes électorales ne doivent provenir que de sources en Israël.

Le Likud, parti de l’actuel premier ministre, accuse le mouvement V15 de faire campagne pour l’Union Sioniste, alliance électorale dirigée par Yitzhak Herzog (HaAvoda) et Tzipi Livni (HaTenouah), et d’être financé par des fonds américains via le New Israel Fund.

V15, ou « Victoire 2015 », est un mouvement de jeunes israéliens voulant promouvoir un changement politique, mais ne se rattachent pas à un parti en particulier. Ils nient avoir recours à des financements étrangers. Pour Yitzhak Herzog, l’accusation du Likud est un ‘mensonge’ : « nous n’avons aucune connexion avec une organisation ou une campagne étrangère visant à remplacer Netanyahou ». La seule preuve serait le lien entre One Voice, une ONG partenaire de V15, et Jeremy Bird, un conseiller de campagne de Barak Obama en 2012. C’est d’ailleurs par manque d’éléments que l’enquête a été fermée.

Eh non, ce n’est pas fini ! La radio de l’armée Galatz rélève le 2 février que Vincent Harris, un stratège politique américain, proche du parti républicain, aurait été engagé par le Likud pour s’occuper de leur campagne. Si cette accusation est vérifiée, on peut se remémorer très fort la phrase favorite de notre enfance : « c’est-celui-qui-dit-qui-l’est ».

Alors, à quoi servent ces débats, à part amuser les mamies et donner du travail aux chroniqueurs comme moi ? A qui profitent réellement ces scandales ?

Ces débats éclipsent presque complètement les débats et discussions sur le fond des programmes. La rivalité entre partis semble plus forte que leur vision sur l’avenir du pays.

Selon Buji (le surnom de Herzog, peut-être le futur Bibi selon les sondages, il faut s’y habituer !) et d’autres commentateurs, ces discussions ont pour objet de saturer l’espace médiatique avec des histoires peu importantes pour faire dévier le débat des questions centrales : une réflexion de fond sur les erreurs et ratés de Netanyahou pendant ses six années au pouvoir. Citons au hasard : trois guerres, un isolement international grandissant, de trop faibles avancées socio-économiques, et ainsi de suite.

Entre les vidéos de Bibi-sitting (désolé, mais avec ce jeu de mot, l’humour juif en prend un sacré coup !), celle où on voit Netanyahou parler à des enfants prenant le rôle de ses rivaux politiques, celle où Naftali Bennett se déguise en hipster, mais aussi les slogans simplistes comme « c’est moi ou eux » et « c’est nous ou lui » (bonus originalité) ou encore la vidéo de campagne si étrange du Meretz mixant Sarit Haddad, de l’arak et du celeri, quand est-ce que cette campagne prendra un peu de hauteur ?

 

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