[avatar user=”Jean-Jacques” size=”thumbnail” align=”left” link=”https://rootsisrael.com/auteur/jean-jacques/” target=”_blank”]JEAN-JACQUES[/avatar] 

Jean-Jacques 39 ans, bourlingueur professionnel, je bosse comme auteur pour une maison d’édition de guides de voyages. J’ai du faire 15 fois le tour du Monde et pourtant je ne me suis jamais arrêté en Israël. J’aime tester les boites de nuits, les piscines des hôtels, les plages, les supermarchés, partout où je vais… et en plus je suis payé pour ça. Quand on m’a demandé de venir en Israël pour tester le pays, j’ai pas hésité une seconde… juste après avoir vérifié mon assurance-vie.

J’avais vraiment envie de ressentir ce pays, quasiment charnellement… première solution, aller en boîte de nuit et clairement toucher du doigt (et plus encore…) la beauté (de la vie) israélienne. Mais c’était sans compter sur Lior qui avait sans doute mal compris mes légitimes revendications et qui me proposa une autre solution, bien moins sexy : s’asseoir à la terrasse d’un café-restaurant… Je n’ai pas toute de suite compris le principe. Mais il est vrai  qu’arrivé depuis quelques jours, j’avais envie d’humer l’ambiance, de prendre la température du pays.

Mais franchement, c’est quoi ce pays ? Pour l’esprit français et donc naïvement cartésien, Israël est une énigme totale, complètement imperméable à la moindre analyse. J’ai beau essayer, je n’y arrive pas. Littéralement coincé entre Orient et Occident, j’y perds mes repères. Quand on est en Egypte, a Alexandrie ou au Caire, c’est clair, tu es au Moyen-Orient, ça sent les épices, le sable, et la moustache bien peignée… Pareil à Miami ou Los Angeles, ça sent le hamburger, les tacos et la crème solaire. Mais à Tel Aviv, entre le Shouk Carmelit où seul l’alphabet hébreu te permet de comprendre que tu n’es pas sur le marché d’Agadir, et la promenade en bord de mer d’où tu t’attends à voir débarquer un exilé cubain à chaque instant, il existe une sorte de schizophrénie permanente, qui ne semble nullement déranger les autochtones (qu’ils soient habillés par 40° en été comme s’ils sortaient d’un shtetl polonais en hiver ou qu’ils s’entêtent à vouloir faire du surf alors qu’il n’y a pas la moindre vague à l’horizon).

Il faut savoir que Tel Aviv est une ville très très concentrée… A mon rythme de parisien, je l’ai traversée en 45 mn,  alors même que sa place dans les médias me faisait croire que j’allais devoir me farcir la traversée de Paris (sans le jambon dans les valises, forcément). Et pourtant y’a autant à faire que dans n’importe quelle métropole internationale.

C’est en regardant l’assiette remplis de houmous, de tehina, et autres spécialités orientales, qu’un serveur genre «beach-boy» californien venait de poser devant moi, que j’eu cette intuition géniale : « Les Israéliens sont en fait des Arabes comme les autres ! » dis-je à Lior. Il sursauta d’abord, puis sourit, tout en trempant un morceau de pita dans le houmous. Clairement, en arrivant à Tel Aviv, au loin, on a l’impression de voir la skyline de Los Angeles, mais en se rapprochant, en détaillant ce style Bauhaus telavivien, on se rend compte d’une chose qu’exprime ce style : des influences occidentales adoucies par des courbes orientales. Mais comment avais-je pu être aveugle à ce point ? A force de vouloir tout mettre dans des cases, tout labelliser, étiqueter, bref, faire mon français, je n’avais pas voulu voir cette réalité israélienne : ce mélange que l’on retrouve aussi dans les petits-déjeuners mélangeant yaourt au miel et poissons d’Europe de l’Est. « Tel Aviv, c’est pas Miami qui se déguise en se cachant derrière des pois chiche à la harissa, non, quand on parle avec les Israéliens, on est vraiment au Moyen-Orient… » rajouta Lior. Et j’allais avoir la démonstration de cette nonchalance explosive typiquement israélienne.

Lior nous avait ensuite commandé sans me demander mon avis un « kafe hafu’h », la boisson nationale israélienne.  Le « kafe hafu’h »… en fait c’est tout simplement du café au lait, mais il faut être honnête…il y’a visiblement un certain savoir-faire authentique et local qui réside dans sa préparation.

A une table près de la nôtre se trouvait un groupe de cinq Israéliens qui s’engueulaient…

« C’est quoi le problème ? » demandais-je

« Un problème ? Où ça ? » me dit Lior en regardant tout autour de lui.

« Bah là, le groupe à côté. Ils sont à deux doigts de se battre » en faisant un discret geste de la tête en direction de leur table, afin de ne pas me faire trop remarquer.

« Ah, mais ils ne s’engueulent pas ! Ils discutent, c’est tout …» me répondit Lior avec un léger sourire en coin.

« Mais ils discutent de quoi ?!? » demandais-je, étonné.

« Ils discutent politique… »

« Ah… »

« Lorsque j’étais en France, me dit Lior, on m’a appris un principe essentiel. On ne discute pas de 2 choses dans un dîner : de religion et de politique. Ici, c’est exactement l’inverse. Il n’y a pas de repas, de dîner, de cafés entre amis sans parler de religion et politique. Ca semblerait d’ailleurs totalement absurde et insipide… »

Je me souviens qu’en Italie, lorsque l’on voyait des gens se hurler dessus, ça ne signifiait pas forcément une engueulade, mais avec les Italiens, l’image de la Commedia dell’Arte ne rendait pas ce « haussement de voix » étonnant. De la part des Israéliens, le haussement de voix dans les discussions me faisait moins sourire, sans doute encore les clichés que j’avais en tête. On a cette image assez spartiate et martiale des Israéliens, ce côté militaire et organisé, assez paradoxalement quasi-germanique, du fait de ce que l’on voit à la télé… alors qu’être au milieu d’eux me faisait ressentir chez eux une toute autre facette, celle d’un moyen-orient  foutoir, où l’on parle fort, où l’on discute politique et religion avec conviction, et surtout, surtout sans crainte, …

A peu de chose près, les Israéliens sont vraiment des Arabes comme les autres…

 ( A suivre…)

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