Depuis octobre 2023, la guerre entre Israël et le Hamas n’a cessé de déchirer le monde, d’alimenter la passion et de scinder les opinions. Si l’émotion est au cœur du conflit, elle masque une question plus dérangeante : qui, au fond, tue réellement les musulmans ? L’histoire se tord lorsqu’on assiste à la couverture médiatique qui a déferlé sur Gaza, jetant un éclairage aveuglant sur les pertes palestiniennes, tout en négligeant les victimes musulmanes des conflits bien plus meurtriers. ll y a une tragédie palestinienne, mais aussi dramatique qu’elle soit, doit-elle occulter une vérité plus dérangeante encore : le véritable génocide silencieux qui se déroule dans les sociétés musulmanes elles-mêmes, dans des conflits internes qui ont déjà causé des millions de morts, et souvent dans l’indifférence la plus totale.
Gilles Kepel et Bernard Lewis ont posé les bases de ce débat, alertant sur l’hypocrisie d’une indignation sélective qui ignore des massacres tout aussi violents, voire plus. Entre le Yémen, la Syrie, le Sahel ou l’Irak, des millions de morts musulmans ont été engloutis par des conflits internes, souvent entre factions sunnites et chiites, avec des rivalités religieuses qui ont fait des ravages bien plus importants que tout ce que le monde a pu observer à Gaza.
Ce n’est pas qu’un débat sur des chiffres ou des perceptions : c’est une guerre des narratifs, où l’émotion est manipulée, et où des vies humaines deviennent des armes politiques. Cet article, réalisé en s’appuyant sur des sources objectives et reconnues à l’international, telles que les grands médias (Le Monde, BBC, The Guardian), les organisations de l’ONU (OCHA, Human Rights Watch), ainsi que des experts et des instituts de recherche géopolitiques, se propose de confronter ces réalités avec rigueur et sans détour.
1. La guerre des chiffres : manipulation et confusion
Le chiffre de 42 000 morts à Gaza, largement relayé par des médias internationaux comme Le Monde, représente environ 2 % de la population de Gaza. Un bilan qui sonne comme un drame humanitaire incontestable. Mais derrière ce chiffre, l’ONU elle-même met en doute sa véracité (Le Point). Les données proviennent du ministère de la Santé de Gaza, qui, en raison de sa proximité avec le Hamas, est loin d’être une source objective et fiable. Il est désormais reconnu que l’Office des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) (Le Monde) a révisé à la baisse, de moitié, le nombre de femmes et d’enfants tués dans le total des victimes. Une révision qui souligne l’impossibilité de valider ces chiffres dans un territoire sous contrôle militaire et politique du Hamas.
Le doute grandit également, quand on constate que le Hamas attribue tous les morts à l’ennemi, sans distinction entre civils et combattants (BBC).
La manipulation des chiffres ne s’arrête pas là : les victimes féminines sont parfois incluses dans les décomptes sans savoir si elles étaient des civils ou des combattantes. Des sources comme le site Wikipédia mentionnent que des femmes ont été actives dans des rôles de soutien ou de combat pour le Hamas, mais sans fournir de chiffres précis. En l’absence de données officielles détaillées, il est difficile d’obtenir des chiffres précis sur le nombre de femmes combattantes du Hamas tuées lors des opérations israéliennes. Les informations disponibles sont souvent basées sur des témoignages ou des rapports non officiels, ce qui rend difficile une évaluation précise de l’ampleur de cette question.
Encore plus alarmant, le recrutement de mineurs. Selon l’ONU, un enfant est défini comme une personne âgée de moins de 18 ans, conformément à la Convention relative aux droits de l’enfant adoptée en 1989. Le Hamas est reconnu pour cette pratique qui soulève de vives préoccupations au regard du droit international. Selon le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU pour les enfants et les conflits armés, le recrutement et l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans comme soldats sont interdits par le droit international humanitaire et sont définis comme des crimes de guerre par la Cour pénale internationale. Et pourtant, des sources suggèrent que le Hamas recrute principalement parmi les jeunes de moins de 18 ans, en raison du taux de chômage élevé à Gaza. Selon le site Understanding War, environ 50 000 jeunes de moins de 18 ans se sont inscrits pour des formations « sécuritaires », c’est-à dire des camps d’entraînement pour les enfants et les adolescents, visant à les préparer à des activités militaires (Île-de-France.info). Ces pratiques ont conduit le Hamas à figurer sur la « liste de la honte » de l’ONU, qui recense les parties au conflit responsables de violations graves des droits des enfants en temps de guerre (20 Minutes).
D’autre part, lorsqu’on comptabilise le nombre de mineurs palestiniens victimes des opérations de bombardement israéliens, on omet de prendre en compte cette donne qui donne d’autres clés d’interprétation que celles relayée par certaines organisations ou médias. Le Ministère de la Santé palestinien ne fait pas de distinction entre les mineurs civils et les mineurs combattants du Hamas dans ses rapports officiels. Cette absence de différenciation rend difficile l’évaluation précise de l’impact des opérations israéliennes sur les enfants, en particulier en ce qui concerne les enfants impliqués dans des activités militaires. Cette approche uniforme dans la comptabilisation des victimes influence fortement la perception internationale du conflit, en ne tenant pas compte des distinctions entre civils et combattants, comme le stipule le droit international humanitaire. Le principe de distinction, énoncé par le Comité international de la Croix-Rouge, exige que les parties au conflit fassent la différence entre les civils et les combattants, afin de protéger les populations civiles.
2. Le traitement médiatique : une couverture biaisée et disproportionnée
D’un côté, les faits, les chiffres, les témoignages, qui font du conflit entre Israël et le Hamas une tragédie humaine. De l’autre, une couverture médiatique biaisée, amplifiée à l’échelle mondiale. Le CAMERA (Committee for Accuracy in Middle East Reporting and Analysis), organisme dédié à l’analyse des biais médiatiques, a révélé en 2023 qu’Israël et le Hamas bénéficiaient d’une couverture 10 fois plus importante que celle accordée à la guerre en Ukraine, pourtant l’un des conflits les plus meurtriers de l’ère moderne. Si l’on se réfère au Wall Street Journal, le bilan humain du conflit ukrainien dépasse les 1 million de blessés et de morts.
De même, par exemple, sait-on qu’en 2023, au Sahel, il y a eu des centaines de milliers de morts dans des conflits internes entre groupes djihadistes ?
Gilles Kepel, expert géopolitique, l’a bien résumé : « Les médias occidentaux ont créé une narration de guerre asymétrique qui occulte des réalités bien plus complexes et des souffrances bien plus vastes. » ( Le Prophète et le Pharaon (2022). Il souligne l’hypocrisie d’un traitement médiatique qui semble réserver une indignation à géométrie variable en fonction des intérêts politiques et diplomatiques. De fait, une émotion sélective se déploie, où les morts à Gaza reçoivent une couverture mondiale, pendant que les millions de victimes musulmanes dans des conflits moins médiatisés restent dans l’ombre.
3. Un génocide en cours ?
Les accusations de génocide portées contre Israël, en particulier concernant ses actions à Gaza, ont plongé la communauté internationale dans un tourbillon de débats passionnés et souvent déconnectés des réalités de terrain. Mais derrière l’indignation et les cris de réprobation, se cachent des interrogations profondes sur ce qu’implique réellement le terme « génocide ». De manière déconcertante, ces accusations, qui semblent de plus en plus instrumentalisées, sont souvent basées sur une lecture sélective et simplifiée des faits. Les points de contestation principaux autour de ce terme sont nombreux et soulèvent des questions cruciales sur la nature des actions israéliennes et le contexte dans lequel elles s’inscrivent.
- Intention de destruction systématique : Le génocide est défini par l’intention délibérée d’exterminer, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Cependant, les détracteurs de l’accusation de génocide contre Israël soulignent l’absence de preuves irréfutables concernant une volonté systématique d’exterminer la population palestinienne. Sans nier de possibles crimes contre l’humanité à Gaza, Yann Jurovics, juriste, et Iannis Roder, historien, récusent, dans une tribune, l’usage du mot « génocide » dans le conflit en cours, qui risque, selon eux, de « banaliser » les actes désignés par ce mot. « Accuser Israël de génocide, c’est ignorer la réalité complexe d’un conflit dont les racines plongent dans des décennies de tensions géopolitiques. Il s’agit avant tout d’une défense légitime contre des attaques terroristes répétées. » ( Le Monde – novembre 2024).
- Proportionnalité et légitimité des actions militaires : Certains analystes estiment que les opérations israéliennes à Gaza sont proportionnelles aux menaces posées par des groupes comme le Hamas. Ils soutiennent que les frappes visent des cibles militaires et que les pertes civiles, bien que tragiques, résultent de la présence de combattants au sein de la population civile, ce qui est une tactique utilisée par des groupes armés non étatiques. Ainsi, ces actions seraient conformes au droit international humanitaire, qui permet l’utilisation de la force en cas de légitime défense. Certains experts estiment que qualifier les actions israéliennes de génocide ne tient pas compte du contexte complexe du conflit israélo-palestinien. Ils soulignent que les hostilités sont le résultat d’un conflit prolongé, avec des cycles de violence de part et d’autre, et que les actions israéliennes sont des réponses à des menaces immédiates, telles que les tirs de roquettes depuis Gaza. On ne peut omettre la volonté permanente de détruire Israël, renseigné dans la Charte du Hamas, et rendu concrète par les faits. Plus de 25000 missiles et roquettes ont été lancés depuis le 7 Octobre 2023 sur le territoire israélien (Le Monde), et on ne parle que ceux du Hamas. Si le Dôme de fer n’avait pas intercepté environ 90% de ces attaques (Middle East Eye), on estime aujourd’hui le nombre de blessés/tués du coté israélien à 25 000 à 45 000 victimes.
- Absence de preuves concluantes : Les opposants à l’accusation de génocide soulignent le manque de preuves irréfutables démontrant une politique israélienne visant à détruire la population palestinienne. Ils remettent en question les méthodologies des enquêtes menées par des organisations comme Amnesty International, arguant que les conclusions sont basées sur des interprétations subjectives et non sur des faits concrets. Dans un article du Point, Michel Laval, avocat à la cour, on rappelle que le but des accusations des activistes propalestiniens contre Israël n’est pas seulement de dédouaner le Hamas de ses crimes sur le mode du tu quoque (toi aussi) lancé à la face des Alliés par les grands criminels nazis. “Il est de dépouiller les Juifs de leurs manteaux d’abominables souffrances, de les priver de leur histoire à jamais tragique et d’ouvrir grandes les portes de leur future persécution”.
- La désinformation : une arme stratégique du Hamas Le Hamas utilise la désinformation comme un outil majeur dans sa guerre médiatique, amplifiant les chiffres et manipulations pour influencer l’opinion mondiale. Le ministère de la Santé de Gaza publie régulièrement des bilans de victimes difficiles à vérifier, souvent révisés à la baisse après des enquêtes indépendantes (Le Point). Des vidéos et images manipulées circulent, créant une perception erronée des événements et alimentant la propagande. En 2021, le Hamas a orchestré des campagnes médiatiques, utilisant des images mises en scène pour inciter à la haine contre Israël. Le groupe empêche également les journalistes d’accéder à Gaza, renforçant sa narration. Des organisations de vérification, comme BBC Reality Check, ont documenté des cas de manipulation ( The Guardian – Hamas and Media Manipulation). Ces actions soulignent l’importance de vérifier les informations venant de Gaza, où la désinformation est un outil stratégique majeur (DIE WELT). Human Rights Watch a rapporté que le Hamas utilise la propagande pour inciter à la haine contre Israël, et que des informations biaisées sont souvent utilisées pour manipuler l’opinion publique.
- Le Hamas et la stratégie du bouclier humain : une tragédie évitable : Le Hamas utilise délibérément la population civile de Gaza comme bouclier humain, en plaçant des infrastructures militaires, comme des roquettes et des tunnels, dans des zones densément peuplées (écoles, hôpitaux, mosquées) (The Sun). Cette tactique complique les frappes israéliennes, qui risquent de causer des pertes civiles massives. En 2014, l’ONU a documenté l’utilisation de ces infrastructures par le Hamas, et en 2021, le Pentagone a confirmé que cette stratégie était toujours en cours. Selon l’armée israélienne, 70 % des roquettes tirées par le Hamas proviennent de zones résidentielles. Cela a entraîné environ 70 % de victimes civiles dans les frappes israéliennes, dont une grande partie d’enfants. Ces actions vont à l’encontre du droit international humanitaire, qui interdit l’utilisation de boucliers humains. Elles rendent le conflit plus complexe et augmentent les souffrances civiles.
4. Les génocides “invisibles”
Si l’on regarde de près les accusations de génocide portées contre Israël, elles semblent disproportionnées par rapport à d’autres tragédies où les musulmans sont les principales victimes. Gilles Kepel, expert en géopolitique, souligne que cette émotion sélective alimente un biais médiatique qui ignore souvent les violences internes au monde musulman, parfois tout aussi meurtrières, voire plus (Gilles Kepel, Le Prophète et le Pharaon, 2022).
Le terme « génocide » implique une destruction systématique et intentionnelle d’un groupe ethnique ou religieux. Toutefois, les pertes civiles palestiniennes, bien que tragiques, restent incomparables aux carnages observés en Syrie, en Afghanistan ou au Rwanda. Bernard Lewis, spécialiste de l’histoire du Moyen-Orient, évoque le phénomène de « génocides invisibles » dans ces régions, où les violences intra-musulmanes ont largement dépassé les pertes humaines des conflits impliquant Israël (Bernard Lewis, The Crisis of Islam).
Les conflits internes entre musulmans, souvent alimentés par des luttes de pouvoir sectaires (sunnites contre chiites), des rébellions contre des États ou des attaques djihadistes, ont causé des millions de morts ces dernières années, mais n’ont pas été traités de manière comparable. En 2023, le SIPRI Yearbook indique qu’en 2022, le nombre de morts liés aux conflits mondiaux a atteint 170 700, avec une majorité écrasante de victimes musulmanes, en grande partie à cause des guerres civiles en Syrie, au Yémen, en Irak et dans le Sahel (SIPRI Yearbook 2024).
Les chiffres des conflits internes entre musulmans (ou impliquant des musulmans)
- Syrie (2011 – en cours) : Plus de 500 000 morts depuis 2011, dont une grande majorité de civils. Les violences sectaires, notamment entre les sunnites et les alaouites (branche du chiisme), ont alimenté le conflit, puis l’ intervention militaire massive de l’Iran chiite et de la Russie, contre des factions sunnites et des groupes djihadistes comme l’État islamique (EI) (Human Rights Watch) a encore considérablement augmenté la liste des victimes.
- Yémen (2014 – en cours) : Environ 377 000 morts depuis 2014 dans le conflit entre les rebelles houthis soutenus par l’Iran et la coalition saoudienne, majoritairement des civils (OCHA Yemen Report 2023). Ce conflit a provoqué une grave crise humanitaire, avec des millions de personnes déplacées et des conditions de famine.( Human Rights Watch).
- Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger – en cours) : Plus de 200 000 morts causés par les violences djihadistes alimentés par des groupes comme Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et l’État islamique au Grand Sahara (EIGS au Mali, Burkina Faso et au Niger, dans une guerre souvent ignorée par les médias occidentaux (Global Terrorism Index 2024). Ces groupes se battent contre les gouvernements locaux et s’attaquent à des civils.( Global Terrorism Index, SIPRI, Associated Press)
- Afghanistan (2001 – en cours) : Environ 70 000 morts dans les affrontements entre les talibans et l’État islamique-Khorasan depuis 2014 (UCDP Database)
- Irak (2003 – en cours) Plus de 200 000 morts depuis 2003. Conflit majeur entre des forces gouvernementales, des groupes sunnites et chiites, ainsi que l’État islamique (EI), qui a intensifié la violence interconfessionnelle. Les violences sont souvent alimentées par des rivalités entre sunnites et chiites. (UCDP Database, Global Conflict Tracker)
- Libye (2011 – en cours) Plus de 50 000 morts à cause d’un conflit interne depuis la chute de Mouammar Kadhafi, impliquant des combats entre différents groupes de milices rivales, dont des factions islamistes et des groupes affiliés à Al-Qaïda. (Ministère des Armées, Wikipédia, Derechos.org )
- Myanmar (Rohingya, 2017 – en cours) Entre 10 000 et 50 000 morts, principalement des Rohingyas musulmans. Le conflit oppose les forces de sécurité birmanes et la minorité musulmane rohingya. Les attaques militaires en 2017 ont été qualifiées de nettoyage ethnique et ont forcé près d’un million de Rohingyas à fuir vers le Bangladesh. (Human Rights Watch, HCR, Reuters, Associated Press)
- République Démocratique du Congo (RDC, 1998 – en cours). Plus de 6 millions de morts, principalement en raison de violences ethniques et de groupes armés djihadistes. Il s’agit d’un conflit complexe entre différentes milices, y compris des groupes musulmans, dans une lutte pour les ressources naturelles et le pouvoir local. (Caritas, Milkipress, SIPRI)
- République Centrafricaine (RCA, 2013 – en cours) . Environ 6 000 morts dans une guerre civile entre des groupes rebelles à majorité musulmane (Séléka) et des milices anti-balaka à majorité chrétienne. Des violences interreligieuses ont exacerbé le conflit. (Human Rights Watch)
- Nigeria (2009 – en cours, Boko Haram). Entre 30 000 et 37 000 morts. Conflit entre l’armée nigériane et le groupe djihadiste Boko Haram, qui a tué de nombreux civils musulmans et chrétiens. Les violences incluent des attentats suicides et des enlèvements massifs. Global Terrorism Index, Human Rights Watch., Statista, Le Monde)
5. Les pourquois des émotions sélectives et silences coupables
Alors, une fois qu’on a dit tout cela, qu’a t’on dit ? Qu’a ton prouvé ? Y a t’il une réponse au pourquoi la mort des Palestiniens, principalement causée par les frappes israéliennes, suscite-t-elle une émotion mondiale disproportionnée, alors que des massacres bien plus graves, dans des conflits inter-musulmans ou ceux opposant des musulmans à d’autres puissances étatiques ou religieuses, semblent presque invisibles dans les médias ? Est ce que cette asymétrie dans la couverture médiatique et l’indignation publique relève du hasard ? ou est-elle façonnée par des intérêts géopolitiques, des récits idéologiques dominants et des dynamiques de pouvoir qui occultent les véritables tragédies mondiales.
On peut évoquer plusieurs éléments de réponse qui semblent être des pistes :
- La délégitimation d’Israël : un levier géopolitique et un terrain fertile pour l’antisémitisme
La délégitimation systématique d’Israël, qui s’est intensifiée après les accords d’Oslo, trouve sa justification dans un narratif simpliste, où Israël est perçu comme un colonisateur illégitime des terres arabes. Ce discours nourrit un antisémitisme latent, souvent camouflé sous des critiques politiques. Un rapport du Center for the Study of Contemporary European Jewry a révélé que l’antisémitisme en Europe a augmenté de 70% depuis 2014, souvent lié à la situation en Israël. Selon Pierre-André Taguieff, l’antisémitisme mondial voit Israël comme la cible légitime de toutes les critiques, même lorsqu’elles touchent à son existence même. Le mouvement Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) en est l’illustration frappante.
- La culpabilité historique de l’Occident et l’impact des récits coloniaux
La critique d’Israël sert aussi d’exutoire pour la culpabilité historique de l’Occident face à son passé colonial, notamment la création d’Israël après la Seconde Guerre mondiale. Certains analystes, comme Edward Said dans Orientalism, affirment que l’Occident utilise la critique d’Israël pour se réconcilier avec son passé colonial, sans prendre en compte la complexité du conflit. Alain Finkielkraut parle de l’ambivalence de l’Occident vis-à-vis des Juifs, oscillant entre un antisémitisme ouvert et un soutien plus paternaliste à la cause palestinienne.
- Les idéologies des Frères musulmans et la construction d’une identité islamique collective
Les Frères musulmans, avec leur vision radicale de l’islamisme, ont joué un rôle central dans la construction de l’opposition globale à Israël. Le Hamas, issu de ce mouvement, a toujours insisté sur le lien indissociable entre jihad et résistance contre Israël. Al Jazeera, financée par le Qatar, diffuse largement cette idéologie en orientant l’opinion publique arabe contre Israël, nourrissant une unité musulmane contre l’Occident.
- L’Occident et ses alliances stratégiques dans le monde arabe
La question centrale demeure : qui défend réellement les vies musulmanes dans ces conflits ? La réponse est inquiétante. Très peu de pays musulmans ou d’Occidentaux s’engagent véritablement à mettre fin aux génocides en cours dans des pays comme la Syrie, le Yémen ou le Soudan. L’hypocrisie géopolitique est flagrante : les puissances occidentales continuent de soutenir des régimes autoritaires du Golfe tout en condamnant Israël. Comme l’a écrit le politologue John Mearsheimer, l’Occident critique Israël tout en soutenant des monarchies autoritaires responsables de violences systémiques contre leurs populations.