Heureux qui comme un Juif a fait une bonne Alya ?

J’arrivais en Israël le 21 juillet 2012, à Be’er Sheva, dans le quartier le plus laid et dégradé de la ville. A quelques mètres de mon appartement se trouvait un gigantesque cratère : personne n’a jamais su me dire à quoi il était dû. La rue était sale, l’aridité épuisante, le soleil brûlant… Mes parents m’ont laissée là, dans ce nouvel appartement déjà habité par de parfaits inconnus et une minute plus tard, je m’effondrais en larmes. Dans quel balagan étais-je donc tombée ?

Pourtant ce même jour, un ami israélien est venu me rendre visite, et m’a dit ces quelques mots qui m’ont marquée : « Welcome to Freedom ! ». J’ai souri, mais je n’avais pas vraiment compris. Je me suis dit qu’il était fou. C’était donc ça la « liberté » ? Vivre dans un pays dont je ne comprenais ni la langue, ni les mœurs ? Avec des monceaux d’ordures et des chats anorexiques au coin de ma rue ?

J’ai mis du temps à comprendre le sens de cette phrase, mais aujourd’hui je crois pouvoir l’expliquer.


Arriver en Israël pour un Juif ce n’est pas forcément être libre, mais c’est se libérer de certains poids.

Le poids d’être « l’ami Juif », le poids d’être l’ambassadeur d’Israël à l’étranger, le poids des regards que l’on te porte lorsque tu as une kippa sur la tête, le poids de ces blagues sur la Shoah qui ne t’amusent pas, le poids de devoir demander à tes amis lorsqu’ils te reçoivent de faire un plat végétarien, ou encore à chaque commande au restaurant : « c’est bien sans jambon ? »…

Theodore Herzl, fondateur du sionisme politique moderne, l’avait bien compris. Il confiait dans son journal du 14 juin 1895, qu’Israël, ce pays qu’il imaginait déjà serait « le pays où nous pourrons nous permettre d’avoir le nez crochu, la barbe noire ou rousse, et les jambes torses sans être pour cela méprisables. Ou nous pourrons enfin vivre libre et mourir en paix, sur un sol qui nous appartiendra ». Et c’est exactement de ces poids-là dont je parle. En effet, lorsqu’un Juif fait son Alya il fait tomber ces poids parce qu’en Israël, les Juifs ne sont plus une minorité. Et finalement, c’est plaisant de faire partie du groupe majoritaire.

Ici, un Juif n’a pas à cacher son nom.

Ici, la nourriture est casher, nous n’avons pas à réfléchir à ce que nous mangeons.

Ici, nous n’avons pas à cacher notre kippa sous une casquette ou notre maguen david dans notre tee-shirt.

Ici, une armée nationale et de masse nous protège.

Ici, nous appartenons à une entité plus grande que le simple cercle de notre famille ou de notre communauté.

Ici, un Juif se retrouve dans les noms de rues, les jours fériés et l’histoire, l’identité et la culture (bien que les cultures juive et israélienne soient d’une richesse et d’une diversité très complexes… mais ceci est une autre histoire).

En fait être Juif en Israël, c’est surtout être libre d’être ce que l’on veut ! Toutefois cette liberté demande des concessions.
Faire tomber ces poids, implique de devoir en porter de nouveaux.

Tout d’abord, si en arrivant en Israël nous ne sommes plus « le juif » d’un autre, nous resterons « un autre » pour nos compatriotes.
Je m’explique. Si la majorité en Israël est une majorité juive, la différence se fait ailleurs.
Les clivages au sein de la communauté juive en Israël sont nombreux, et s’articulent autour de plusieurs axes :

  • Ton degré de religiosité : laïque, réformé, traditionnaliste, religieux, ultra-orthodoxe, habad ou breslavi… 
  • Ton appartenance ethnique : séfarade, ashkénaze, falasha, mizrahi… 
  • Ta position face au conflit israélo-palestinien : et cela oscille entre deux extrêmes, de la gauche la plus antisioniste à la droite la plus radicale. 
  • Ton pays d’origine (pour les Olim) : américain, français, russe, uruguayen, éthiopien, canadien, allemand et j’en passe.

Bref, si vous quittez la France pour ne plus être « le juif » de quelqu’un, soyez bien conscients qu’en Israël, vous serez toujours l’autre de quelqu’un.
Vous le comprenez donc, la vie en Israël n’est pas toute rose non plus. D’ailleurs, Ben Gurion avait déjà prévenu dans ses mémoires : « Ceux qui s’apprêtent à partir pour Erets Israël et qui pensent à un pays romantique, à son avenir, aux souvenirs de son passé et à son antiquité fascinante, s’éloignent du pays réel avec la dureté de sa vie quotidienne ».


C’est pourquoi vivre en Israël doit être un choix de vie et non une fuite.

Il faut aimer la hutspa israélienne, accepter le climat et les conditions socio-économiques.

Il faut accepter de faire partie d’un pays relativement seul face à l’adversité.

Il faut accepter de remettre ses normes et ses codes en question, après vingt, trente, quarante ans de vie en France.

Il faut être prêt à apprendre une nouvelle langue.

Il faut renoncer à certaines belles choses que nous avions aussi en galout : la pâtisserie (non mais la vraie : les rugelach ne sont pas une pâtisserie !), les jolies fringues, le bon fromage et le bon vin bordelais, la politesse, le vouvoiement, nos jolis paysages européens, l’architecture française, la pluie (de temps à autres, cela me manque, je le confesse), l’ambiance de Noël qui anime les rues et réchauffe les cœurs en décembre même si nous ne célébrons pas cette fête, la romance à la française, l’élégance et le chic parisien, un salaire minimum bien supérieur au salaire minimum israélien, un système de sécurité sociale efficace, les bonnes manières…

Ainsi, si vous êtes prêts à abandonner ces choses-là en connaissance de cause, si ce choix est réfléchi et conscient, alors ce sera une belle Alya, car une Alya pour être réussie doit être pensée et préparée !

Et ce n’est pas tout. Israël est un pays dans lequel il ne fait pas toujours bon y vivre : il y a des guerres, des morts, des alarmes, des roquettes, des attentats, une peur présente, des tabous, des problèmes sociétaux qui s’aggravent, un racisme bien ancré dans la société, des fossés entre certaines strates de la population qui se creusent, des tensions religieuses grandissantes. Ce sont des problèmes graves, que nous ne sommes pas tous prêts à encaisser.

De plus, l’intégration pour un Français n’est pas forcément facile au début, c’est pourquoi l’Alya doit être un choix de raison.

Avant de me faire lapider, je félicite évidemment l’énorme travail de nombreuses agences qui promeuvent l’Alya, qui aident à l’intégration des Juifs en Israël, qui leur apportent un soutien tant financier que moral ou social.

Toutefois, je ne peux m’empêcher de grincer des dents quand celles-ci ne montrent que la partie émergée de l’iceberg ; La belle Alya.
Parce qu’il faut le dire, pour certains, l’Alya est difficile, et après quelques mois ou années il y’en a même qui rentrent, une main devant, une main derrière.

Puis, il ne faut pas se leurrer. Même après des années de vie en Israël, nous garderons cette petite partie de France au fond de nous. Car le français est la langue dans laquelle nous avons appris à penser, à rêver, à se disputer, à aimer. Nous garderons à vie ce petit accent qui s’atténuera avec les années (et encore !), nous serons toujours fiers de clamer que nous avons grandi à « Pariz » ou sur la « French Riviera, kehilou Monaco veze… ».

Néanmoins, si nous resterons des franco-israéliens, nos enfants eux, seront de vrais petits israéliens : ils iront à l’école en Israël, ils parleront l’hébreu mieux que nous et nous corrigerons, ils iront à l’armée et tout ce qui s’en suit, et finalement c’est peut-être cela que l’on recherche aussi en faisant l’Alya : garantir à nos progénitures un avenir en Israël.

Enfin, je crois profondément qu’Israël doit être l’Etat pour les Juifs qui le veulent. A la différence des derniers siècles, il existe aujourd’hui un endroit où aller lorsque que nous sommes menacés. Nous trouverons une nouvelle maison, un refuge et la sécurité en Israël, lorsqu’auparavant, le Juif était condamné à errer.

Pour chaque Juif qui ne se sentira plus à sa place dans son pays d’origine, une place lui sera réservée en Israël.

C’est pourquoi Israël sans le droit du retour perdrait sa raison d’être. Mais sur le long terme, peut-être faudra-t-il repenser le modèle car notre petit pays risque de saturer.

D’ailleurs, je ne crois pas que tous les Juifs de la Terre doivent nécessairement faire leur Alya. Tout d’abord parce que les Juifs de diaspora sont cruciaux à la survie d’Israël, mais aussi car c’est cette diaspora qui fait la beauté et la richesse de l’identité juive en 2015.

En somme, faire son Alya c’est se libérer de certains poids pour accepter d’en porter d’autres, que l’on a cependant choisi. Ainsi, à tous les Olim ou futurs Olim : « Welcome to Freedom » !


Et à tous ceux qui choisissent de rester en France ou en Galout, je vous dis « merci ». Car je sais les poids que vous portez, je sais le travail que vous faites pour soutenir Israël et représenter Israël en France comme ailleurs, je connais vos combats, je sais aussi que vous vous sentez bien en France, et je vous comprends. Car nous pouvons être fiers d’être des Français Juifs, héritiers d’une longue tradition juive en France, d’une longue histoire, d’une culture bien à part.

Je vous remercie de continuer à porter la belle culture des Juifs de diaspora. N’écoutez pas ces coreligionnaires fermés qui considèrent que vous êtes un vendu parce que vous êtes toujours en France, qui passent leur temps à vous plaindre et à cracher sur la France qui les a bercés. N’ayons ni peur, ni honte de notre double identité car c’est ce qui fait la beauté, la richesse et la spécificité de notre culture en France, et en Israël.

Personnellement, quel choix j’ai fait ? J’ai choisi de me libérer de mes poids pour en porter d’autres, à l’unisson avec la société israélienne. Lâcheté ? Paresse ? Faiblesse ? ou force ? Je ne sais pas, mais peu importe car c’est un choix qui me comble de bonheur, je suis fière de porter en Israël les couleurs de la France et de la République. Je suis heureuse d’avoir trouvé ma place en tant que personne dans un pays qui me ressemble, me fascine et me surprend un peu plus chaque jour (même si je dois l’avouer, y’a des jours où je massacrerai ce p***** de chauffeur de bus qui fait exprès de partir alors qu’il me voit courir à m’en arracher les poumons…).

 

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1 comments
  1. Bonjour Oriane,

    J’ai vécu 2 ans en Israël, j’y suis devenu Israélien, mais je suis souvent venu en Israël à diverses occasions dans mon enfance et mon adolescence. Je ne me retrouve absolument pas dans la description que vous avez faite du pays.

    Je vais éplucher et commenter point par point votre réflexion :

    « J’arrivais en Israël le 21 juillet 2012, à Be’er Sheva, dans le quartier le plus laid et dégradé de la ville. »

    Vous avez joué de malchance, en Israël il y a beaucoup de villes et de quartiers, magnifiques (j’ai vécu en tant qu’Israélien à Jérusalem dans le quartier de Na’hlaot, dans celui de Katamon Baka, j’ai aussi vécu avant de faire ma ‘alyah à Tel Aviv pas loin du Dizengoff Center, mais aussi avant et après avoir fait ma ‘alyah, dans les banlieues de Tel Aviv (Ramat Gan et Giv’atayim) qui sont tout aussi superbes que les villes et quartiers dont je vous ai parlé et qui n’ont rien à voir avec la laideur des banlieues françaises.

    Avant ma ‘alyah, j’ai vécu en Galilée (kibboutz Dan), dans le quartier de Jérusalem Kyriat Moshé, et à Kyriat Arba’, je n’ai jamais vu quoi que ce soit d’aussi laid et sale que vous décrivez. Le seul endroit QUE JE TROUVE laid et sale est le quartier ultra orthodoxe de Jérusalem, Méa She’arim.

    « A quelques mètres de mon appartement se trouvait un gigantesque cratère : personne n’a jamais su me dire à quoi il était dû. »

    Ou vous n’avez pas pu comprendre les explications que l’on vous donnait vu que vous ne parliez pas du tout l’hébreu ;o)

    « La rue était sale, l’aridité épuisante, le soleil brûlant… »

    Pour la rue sale, j’ai déjà commenté. Il est étonnant que vous parliez de rues sales en décrivant Be’er Sheva, alors que toutes les villes et quartiers que j’ai visité et où j’ai vécu en Israël sont incroyablement propres (à l’exception d’un quartier) quand, en France, les rues sont jonchées de déjections canines et que les trottoirs regorgent d’urine humaine… Mais bon, passons… Pour le soleil brûlant, ce n’est pas pour rien que, comme les Espagnols en Espagne, les Israéliens font la sieste en Israël entre midi et 16h et qu’il y a le masgan (le mizoug avir, la clim’) dans tous les magasins et les habitations. Personnellement, j’étais tellement heureux d’être en Israël que je voulais profiter de l’intégralité de mes journées. Je ne faisais pas la sieste entre midi et 16. Je sortais et j’adorais cette chaleur et ce soleil, en été ! Les températures étaient plus chaudes qu’en France mais c’était plus supportable qu’à Paris où la pollution et l’effet de cuve empêchent l’air de circuler et le rendent vite moite, étouffant et insupportable. A Jérusalem, c’est l’air sec des montagnes, à Tel Aviv l’air humide maritime, mais les deux sont tout à fait agréables, y compris le climat de Kyriat Arba’ et de la Galilée

    Pour l’aridité, le mot est vraiment terriblement excessif, mais il y a des climats différents selon les endroits en Israël où vous allez. Comme je l’ai écrit, à Jérusalem l’air est sec. Dans le pays, en général, on fait attention à éviter le gaspillage d’eau qui est, comme dans toute la région, une denrée précieuse… Mais ce n’est pas non plus la misère. C’est en France où l’on a pris des habitude de gaspillage avec l’eau. En Israël il y a des méthodes pour réduire le gaspillage et permettre d’avoir la quantité d’eau nécessaire pour nous et pour les plantes.

    « Mes parents m’ont laissée là, dans ce nouvel appartement déjà habité par de parfaits inconnus  »

    Il s’agissait, je présume de shoutafim, de co-locataires. C’est un mode de vie courant pour partager un loyer en Israël. J’ai vécu dans un appartement en colocation en Israël (à Jérusalem, Na’hlaot), c’était super sympa. Mes shoutafim étaient composés d’un ami francophone et d’un groupe de Juifs américains qui ramenaient souvent des copains à eux… enfin, surtout des copines. Mais l’ambiance était sympa et marrante. Nous apprenions à nous découvrir les uns les autres, chacun avait ses petites manies, etc… Bref, une expérience vraiment très chouette.

    « et une minute plus tard, je m’effondrais en larmes. Dans quel balagan étais-je donc tombée ? »

    Vous avez paniqué et craqué et pourtant vous n’aviez aucune raison de le faire. Votre problème est que vous avez tout analysé négativement, et c’est vraiment très dommage car il n’y avait vraiment pas lieu de le faire, et donc votre expérience ne pouvait pas être bonne.

    Je note en passant votre formule « Mes parents m’ont laissée là, dans ce nouvel appartement déjà habité par de parfaits inconnus  »

    Ce qui ressemble fort à l’expression d’un sentiment d’abandon par vos parents. Si c’est ce que vous aviez ressenti, pas étonnant alors que toute votre perception des choses ait été altérée négativement.

    « C’était donc ça la « liberté » ? Vivre dans un pays dont je ne comprenais ni la langue, ni les mœurs ? »

    Là votre second problème est que vous vous êtes vous-même placée en position d’étrangère, alors que ce pays et cette langue, contrairement à ce que vous semblez croire, sont tout sauf étrangers. C’est la France qui est un pays étranger pour nous. C’est un des pays d’accueil que nous avions eus parce que nous n’avions nulle part où aller et une langue que nous avons été obligés d’apprendre pour pouvoir y vivre, mais ce n’est ni notre pays ni notre langue… Quant aux moeurs, elles ne sont pas si différentes en Israël, au grand dam des Arabes qui pensent que les Juifs occidentalisent le Moyen-Orient avec Israël. Là encore, vous vous êtes placée en position d’étrangère et non comme une personne qui revient chez elle et qui redécouvre son pays et sa langue… Ce qui fait que vous avez créé psychologiquement une sorte de ravin entre Israël et l’hébreu, d’un côté (que vous avez interprété comme étant étrangers à vous), et vous de l’autre. c’est bête, l’hébreu est une langue super simple à apprendre (et à aimer !)

    « Avec des monceaux d’ordures et des chats anorexiques au coin de ma rue ? »

    Je ne sais pas pour votre rue, mais en Israël, tous les endroits où je suis allé et où j’ai vécu étaient impeccablement propres et les chats des rues étaient loin d’être anorexiques !

    « Les clivages au sein de la communauté juive en Israël sont nombreux, et s’articulent autour de plusieurs axes :

    Ton degré de religiosité : laïque, réformé, traditionnaliste, religieux, ultra-orthodoxe, habad ou breslavi… »

    Les gens se fréquentent, il est vrai, souvent par préférence (ce ne sont pas des clivages, le mot est très clairement exagéré), mais il n’y a pas de barrière physique ou psychologiques entre les gens pour autant. Ce qui n’empêche pas les gens des différentes sensibilités religieuses dont vous avez parlé de débattre parfois ensemble. Rien de bien grave, ça fait partie des moeurs du pays (que vous ne comprenez pas).

    A propos, « réformés, ultra-orthodoxes, ‘habad ou breslev, traditionalistes », tous sont pratiquants et pratiquants = religieux. Pourquoi donc avoir ajouté le mot « religieux » à cette liste de noms, comme si c’était différent ?

    « Ton appartenance ethnique : séfarade, ashkénaze, falasha, mizrahi… »

    Même chose, et c’est pareil en France. Les Juifs de France ne sont pas fermés aux non-Juifs mais aiment se retrouver car ils partagent des souvenirs, des expériences et une culture commune… C’est pareil en Israël entre les différents Juifs. Les groupes se dissoudront avec le temps, les uns apprenant à découvrir les autres et à vivre avec eux. C’est un processus logique et qui est temporaire, ce regroupement entre différents groupes.

    J’ajoute que le mot « falasha » est un mot péjoratif éthiopien désignant les Juifs d’Ethiopie. Il équivaut au terme « youpin’ ou « youtre » en France. L’appellation des Juifs d’Ethiopie est, et doit être, les Béta-Israël.

    « Ta position face au conflit israélo-palestinien : et cela oscille entre deux extrêmes, de la gauche la plus antisioniste à la droite la plus radicale. »

    Ça, par contre, c’est effectivement un sujet ultra-sensible et très central dans la société israélienne. De nombreux débats houleux ont lieu à ce sujet.

    « Ton pays d’origine (pour les Olim) : américain, français, russe, uruguayen, éthiopien, canadien, allemand et j’en passe. »

    Ça, c’est juste une information, ni un groupement ni un sujet de discorde.

    « Theodore Herzl, fondateur du sionisme politique moderne, l’avait bien compris. Il confiait dans son journal du 14 juin 1895, qu’Israël, ce pays qu’il imaginait déjà serait « le pays où nous pourrons nous permettre d’avoir le nez crochu, la barbe noire ou rousse, et les jambes torses sans être pour cela méprisables. Ou nous pourrons enfin vivre libre et mourir en paix, sur un sol qui nous appartiendra ».

    J’ai lu L’Etat Juif de Theodor Herzl, ce passage n’y figure pas mais, pour ce que j’en comprends, cela traduit la liberté d’être Juif entièrement et sans contrainte, sans avoir peur, ce que vous avez très bien expliqué ensuite.

    « D’ailleurs, Ben Gurion avait déjà prévenu dans ses mémoires : « Ceux qui s’apprêtent à partir pour Erets Israël et qui pensent à un pays romantique, à son avenir, aux souvenirs de son passé et à son antiquité fascinante, s’éloignent du pays réel avec la dureté de sa vie quotidienne ». »

    David Ben Gurion parlait de l’Israël des années 50-60… Il me semble très déplacé de sortir ses propos de leur contexte historique et de les utiliser pour appuyer un propos contemporain !

    « Il faut accepter de faire partie d’un pays relativement seul face à l’adversité. »

    Pendant 10, 20, 30, 40 ans, ou plus, nous avons bien pu vivre au sein même de l’adversité, dans une communauté assiégée de détracteurs et de haïsseurs d’Israël, comment serait-il plus difficile de vivre en Israël qu’en France, alors ??

    « Il faut renoncer à certaines belles choses que nous avions aussi en galout : la pâtisserie (non mais la vraie : les rugelach ne sont pas une pâtisserie !) »

    Toutes les pâtisseries en Israël ne sont pas des pâtisseries ashkénazes et il y en a de très bonnes qui sont séfarades… Maintenant, c’est vrai qu’il ne faut (pour le moment, en tous cas) pas y chercher un Paris-Brest, un chausson aux pommes, une religieuse ou un éclair au café, ni un croissant aux amandes, mais ça viendra… Parce qu’il y a aussi des Juifs parmi les boulangers en France et qu’un jour, ils apporteront à Israël ces spécialités.

    « les jolies fringues »

    Beaucoup de fringues (la plupart) en France sont franchement laides, mais vous savez, si vous n’aimez pas les fringues israéliennes, il existe des boutiques en ligne, ou sinon, vous pouvez demander à vos parents ou amis restés en France de vous en acheter…

    « le bon fromage »

    Ça, c’est faux. Le fromage français a depuis longtemps commencé à remplir les rayons du Shekem, et il y en a de plus en plus.

    « et le bon vin bordelais »

    Question de goût… Moi, j’aime le vin sucré et je n’en connais pas de meilleurs que les vins sucrés israéliens. Mais Israël produit aussi du vin rouge, et il est réputé et maintes fois primé pour son excellence. A mon avis, vous avez mal cherché.

    « la politesse »

    Les Israéliens sont plus directs, et parfois ont une certaine ‘houtspah, mais rien ne vous empêche d’apporter la politesse en Israël… Pas en l’enseignant à des Israéliens, mais en la pratiquant vous-même, et si vous avez un ou des enfants un jour, la transmettre. C’est vrai que c’est une subtilité qu’il ne faut pas perdre. Israël n’est pas un pays construit. C’est un pays en perpétuelle construction. Sa construction ne sera terminée que lorsque tous les Juifs du monde vivront en Israël et depuis des générations (et là encore, rien n’empêchera la société israélienne de continuer d’évoluer).

    « le vouvoiement »

    C’est vrai qu’en hébreu, le vouvoiement n’existe pas. Tout le monde se tutoie. Mais ce n’est pas pire… Et c’est peut-être même mieux : Je précise qu’en anglais, c’est le tutoiement qui n’existe pas. Le vouvoiement met une distance entre les gens alors que le tutoiement les rapproche. Tout dépend si l’on aime établir des distances avec les gens ou si l’on préfère quelque chose de plus familial ou amical dans l’atmosphère, entre nos interlocuteurs et nous. Moi, je trouve très sympa le tutoiement en hébreu.

    « nos jolis paysages européens »

    Ça, c’est aussi une question de goût. Personnellement, je trouve les paysages européens, à quelques exceptions près, sinistres et ceux israéliens splendides.

    « l’architecture française »

    Même chose. La France ne s’est jamais faite remarquer par l’audace de ses créations, ni en art, ni en architecture, ni en design,… En Israël, il existe une certaine audace architecturale qui est très intéressante et belle.

    « la pluie (de temps à autres, cela me manque, je le confesse) »

    Mais il y a de la pluie en Israël (pas en été, bien sûr, mais il n’y en a pas non plus en été en France – sauf en cas de canicule- . En Israël, on a le beau temps, la pluie, la neige… Au niveau des paysages, on a la mer, la montagne, la ville et la campagne…

    « l’ambiance de Noël qui anime les rues et réchauffe les cœurs en décembre même si nous ne célébrons pas cette fête »

    On a Pourim et Souccot qui n’existent pas en France (pas à l’échelle nationale) et si l’on veut l’ambiance de Noël, il suffit d’aller au rova’ Ha Notsri (au quartier chrétien) de la vieille ville de Jérusalem.

    Cela dit, nous décorons aussi nos rues de guirlandes.

    « la romance à la française »

    C’est là un cliché français qui n’est pas aussi fréquent qu’on le prétend. Mais des romances, et des romances poétiques sont tout à fait possibles en Israël.

    « l’élégance et le chic parisien »

    Vous avez lu ça sur une plaquette de l’office du tourisme parisien ? Parce que rien n’est plus cliché et plus faux que cette idée reçue. J’en sais quelque chose : je suis né et j’ai grandi à Paris.

    « un salaire minimum bien supérieur au salaire minimum israélien »

    Ça, c’est vrai que le SMIC français est supérieur au salaire minimum israélien… Mais le coût de la vie et les impôts sont beaucoup plus élevés qu’en Israël. La France est réputée pour être l’un des pays les plus fréquemment et lourdement taxés en divers impôts ! Alors gagner plus pour perdre plus, je ne vois pas trop l’intérêt…

    « un système de sécurité sociale efficace »

    La sécurité sociale israélienne est aussi très efficace… Peut-être même plus dynamique et plus vivante que celle de la France… La sécurité sociale en France couvre de moins en moins les gens, les retraites, en France, sont misérables, l’assurance maladie dérembourse un maximum ou rembourse seulement les soins les plus mauvais… Bref… Sur ce point, je ne suis pas, non plus, d’accord avec vous.

    « les bonnes manières… »

    Nous en avons déjà parlé plus haut.

    « Et ce n’est pas tout. Israël est un pays dans lequel il ne fait pas toujours bon y vivre »

    Et vous en rajoutez une couche…

    « il y a des guerres, des morts »

    Non. Ce propos n’est pas exact. Des guerres avec les pays voisins, Israël n’en a pas connu depuis les années 70. Il y a des interventions militaires dans la Bande de Gaza quand les groupes terroristes qui s’y trouvent balancent un peu trop de missiles sur les localités proches (Ashkelon et Ashdod) (et beaucoup de roquettes tombent dans des terrains vagues. De toutes façons, Israël est protégé par le Kipat Barzel (l’Iron Dome) qui détruit les roquettes en plein vol, système désormais complété par La Fronde de David).

    Des morts ? Oui, mais très peu. La dernière vague d’assassinats massifs a eu lieu il y a 17 ans, lors de la seconde intifada. Depuis, il y a des tentatives qui échouent le plus souvent, mais le nombre de morts par an est statistiquement très inférieur au nombre de morts par an en France par les accidents de la route, les violences de rues et violences domestiques… Et je ne parle même pas des attentats qui frappent le continent européen dont la France !

    En Israël, en plus, au cas où, il y a des miklatim (des abris) dans la plupart des habitations et des magasins. Ce qui n’existe pas en France, ni n’importe où dans le monde.

    « des alarmes »

    Oui, lorsqu’il y a danger, et cela permet de sauver des vies. Préféreriez-vous pas d’alarme et des roquettes qui frappent sans prévenir des habitations d’Ashkelon ou d’Ashdod ?

    « des roquettes »

    Sur Ashdod et Ashkelon. Pas sur les autres villes du pays !

    « des attentats »

    Oui, ça arrive de temps en temps, mais c’est rare, et cela arrive aussi en France, en Angleterre, en Allemagne, en Suède, en Espagne, aux Etats-Unis, etc….

    « une peur présente »

    Purement et simplement FAUX. On dirait que vous n’êtes jamais allée en Israël… Êtes-vous sûre de connaître ce pays et ses habitants ? Au contraire, il y a une sérénité tout à fait surprenante de la part des habitants, contrairement à ce à quoi l’on pourrait s’attendre en regardant la télé française ou les journaux français…

    « des tabous »

    Je présume que oui, comme dans toute société, encore que je n’en ai moi-même jamais fait l’expérience et que je n’en ai jamais eu écho… Pouvez-vous, concrètement, citer des exemples ?

    « des problèmes sociétaux qui s’aggravent »

    Quels problèmes ? Soyez précise !

    « un racisme bien ancré dans la société »

    Ça, c’est de l’intox pure ! Il se peut (et encore, E-VEN-TU-ELLE-MENT) que les personnes qui vous entouraient étaient racistes, mais prétendre que le racisme est bien ancré dans la société israélienne est un mensonge complet.

    Du racisme visant qui ? Comment ? Vous lancez une accusation grave qui n’est corroborée concrètement par rien sur le terrain.

    « des fossés entre certaines strates de la population qui se creusent »

    Quels fossés ??? Des chiffres !!! Vous avez des stats pour sortir ce genre d’énormités ?? Dans ce paragraphe, je trouve vos propos, excusez-moi, mais, complètement délirants !

    « des tensions religieuses grandissantes »

    Encore bidon ! Encore de l’intox !

    « Ce sont des problèmes graves, que nous ne sommes pas tous prêts à encaisser. »

    Votre prisme de la société israélienne est assez douteux, je trouve. Surtout que vous tenez des propos infondés, flous, ne reposant sur aucun exemple concret de ce que vous avez vécu, lu ou entendu, et que vous ne citez aucun chiffre, aucune source.

    « De plus, l’intégration pour un Français n’est pas forcément facile au début »

    Si vous partez du principe que vous êtes dans un pays étranger, que l’on y parle une langue étrangère, et que les moeurs sont étrangères, il est logique que vous ayez du mal à vous intégrer. Tout est une question d’approche.

    « Avant de me faire lapider, je félicite évidemment l’énorme travail de nombreuses agences qui promeuvent l’Alya, qui aident à l’intégration des Juifs en Israël, qui leur apportent un soutien tant financier que moral ou social. »

    J’espère que vous ne faites pas allusion à l’Agence juive, car elle ne fait rien de tout cela. Elle n’aide pas du tout les Juifs à venir s’installer en Israël, je parle en connaissance de cause. Elle le faisait autrefois mais depuis 2012 et l’arrivée de Nathan Sharansky, l’Agence juive a complètement abandonné sa mission historique. Elle ne se concentre plus que sur le renforcement de l’identité juive en diaspora. De nombreux articles ont d’ailleurs été publiés à ce sujet.

    « Parce qu’il faut le dire, pour certains, l’Alya est difficile, et après quelques mois ou années il y’en a même qui rentrent, une main devant, une main derrière. »

    Ceux qui arrivent comme des étrangers en Israël et qui veulent apprendre aux Israéliens les « bonnes manières » françaises risquent, en effet, de se casser les dents. Ceux qui gardent comme référence absolue la France ou un autre pays de diaspora d’où ils viennent et considèrent la société israélienne comme une société complètement différente d’eux, complètement étrangère, risquent en effet d’avoir du mal à tenir sur la longueur. Bien vite la nostalgie du pays de provenance les ramènera à ce pays, faute d’avoir pu (ou voulu) s’intégrer à la société israélienne.

    « Puis, il ne faut pas se leurrer. Même après des années de vie en Israël, nous garderons cette petite partie de France au fond de nous.  »

    De quelle France parlez-vous ? De celle où un Juif ne peut pas vivre libre ? De la France antisémite des années 2000 ? De la France de Pétain ? De la France de Louis Ferdinand Céline (antisémite) ? De la France de Voltaire (antisémite aussi) ?

    « Car le français est la langue dans laquelle nous avons appris à penser, à rêver, à se disputer, à aimer. »

    Il est toujours possible pour les fans du français de partir s’installer à Netanyah. Les francophones y sont ultra-majoritaires.

    « Nous garderons à vie ce petit accent qui s’atténuera avec les années (et encore !) »

    Evidemment, « Et encore ! »… Si l’on passe sa vie à parler en français plutôt qu’en hébreu. Mais ce choix du français ne garantira pas forcément une bonne intégration à la société israélienne, il faut le savoir.

    « nous serons toujours fiers de clamer que nous avons grandi à « Pariz » ou sur la « French Riviera, kehilou Monaco veze… ».

    Non, pas forcément. Tout dépend de ce que représente la France pour le Juif de France arrivant en Israël, ET SUTOUT, de ce que représente Israël à ses yeux.

    Personnellement, je pense que savoir parler deux langues est toujours un atout, et ce à différents niveaux. Mais il ne faut jamais oublier que notre pays est et a toujours été Israël et notre langue est et a toujours été l’hébreu, même si nous avons, par la force des choses, vécu en ‘houts laarets (en dehors d’Israël) et que nous avons appris les langues et les cultures de ces pays. Pour ma part, je suis né à Paris, mais ma mère, ma grand-mère (z »l), mes tantes, mon grand-père, mes cousins, mes grands oncles et mes grandes tantes viennent de Tunis, en Tunisie. Encore avant, ils venaient du Maroc, et encore avant de Livourne, en Italie, et encore avant, du Portugal… Mais nos yeux et nos coeurs étaient toujours tournés vers notre terre ancestrale.

    Ma grand-mère (z »l), ma mère et ma tante ont été vivre en Algérie après avoir quitté la Tunisie, puis en France. Pendant que ma grand-mère (z »l), ma mère et mes tantes étaient en Algérie, le reste de ma famille ont été allés s’installer en Israël.

    « Néanmoins, si nous resterons des franco-israéliens »

    Non. J’ai la double nationalité. En termes technique, je suis de nationalité franco-israélienne, mais je me suis toujours senti Israélien, et je me suis toujours présenté comme Israélien (sauf en France, je ne veux pas me faire lyncher ou assassiner !).

    Je ne me suis jamais pensé autrement qu’Israélien. Mais si l’on me demande, je dis « Je viens de France ».

    « les Juifs de diaspora sont cruciaux à la survie d’Israël »

    En quoi le sont-ils, précisément ? En tant qu’ambassadeurs d’Israël ? Mais personne ne les écoute ! Et il y a Internet aujourd’hui ! On peut créer un site depuis Jérusalem, par exemple, ou Be’er Sheva’, pour expliquer les choses aux Français qui veulent sincèrement s’informer sur Israël.

    « je sais aussi que vous vous sentez bien en France »

    Comment pouvez-vous tenir de telles affirmations ??? Surtout juste après avoir écrit (très justement) « je sais les poids que vous portez » ??? Savez-vous ce que c’est de souffrir d’être entouré en permanence de cette haine anti-israélienne (qui n’est rien d’autre que la vieille haine antisémite avec des habits neufs), savez-vous ce que c’est d’avoir peur de parler d’Israël ou de parler hébreu dans la rue ? Savez-vous ce que c’est de ne pas oser sortir une kippa sur la tête et/ou un magen David sorti ? Savez-vous ce que c’est d’être insulté parce que Juif ?

    Ou vous ne savez rien de tout cela et vous NE POUVEZ PAS parler pour les Juifs de France, ou vous le savez, et vous NE POUVEZ PAS dire « je sais aussi que vous vous sentez bien en France » ! Comment se sentir bien dans un tel climat ? Où l’antisémitisme est tellement omniprésent ? Comment se sentir bien dans un pays où l’on est sans arrêt obligé de se justifier en tant que Juif par rapport à Israël, de combattre les mensonges diffusé contre notre pays (Israël, que l’on ait ou non la nationalité israélienne) et se retrouver isolé parce qu’on se trouve en fasse de personnes qui vous ont déjà désigné comme coupable ? Comment se sentir bien alors que l’on est tué parce que Juifs en France et que l’Etat français ne fait rien pour nous protéger ? Comment fait-on pour se sentir bien alors que la plupart des Juifs on quitté (fuit !) le territoire et qu’il y a de moins en moins de boutiques cachères, et de boutiques juives, d’ailleurs, en général ? Comment se sentir bien quand on n’ose plus aller à la synagogue ou à une manifestation juive de peur d’être suivi et lynché / assassiné ? Comment se sentir bien dans un pays qui ne cesse de déverser ses poubelles sur nous tout en prétendant lutter contre l’antisémitisme ???

    Non, on ne peut pas se sentir bien dans un tel pays !

    « Car nous pouvons être fiers d’être des Français Juifs »

    « Juifs de France » ou « Juifs français », pas « Français juifs ». Notre peuple est et a toujours été le peuple juif. Il doit donc être en 1er. Vient ensuite la nationalité : française. Ce sont deux choses différentes.

    « héritiers d’une longue tradition juive en France, d’une longue histoire, d’une culture bien à part »

    les Juifs achkénazes ont depuis longtemps quitté la France dans leur immense majorité. Les Juifs séfarades leur ont succédé à partir des années 50 en arrivant d’Afrique du Nord.

    Parler d’héritage « d’une longue tradition juive en France » me semble donc assez inapproprié, car assez peu en phase avec la réalité.

    Quant à notre culture, elle est juive séfarade, pour la plupart d’entre nous. Agrémentée de connaissances culturelles françaises.

    « N’écoutez pas ces coreligionnaires »

    Nous sommes un peuple, pas une religion ! Ahurissant qu’il soit nécessaire de rappeler de telles évidences !

    https://jsuisjreste.wordpress.com

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