Un journaliste américain avait une expression sur le conflit israélo-arabe: « Si on vous explique ce conflit et que vous avez compris, c’est qu’on vous l’a mal expliqué. »
Nous sommes en plein dedans.
Sur mon Facebook, je vois plein d’images et de vidéos, la plupart pour soutenir Israël, et je suis allé voir sur d’autres profils, des images et des vidéos pour soutenir les Palestiniens.
Guerre des images ridicule et futile.
Personnellement, je ne partage que très rarement des images, des chiffres, et vidéos sur Israël.
Pourquoi?
Car cela ne va convaincre que ceux qui sont déjà convaincus, crisper encore plus ceux qui sont contre, et ne pas avoir la moindre influence sur ceux qui n’ont pas d’opinion.
Pensez-vous vraiment qu’une illustration estampillée « Tsahal » va convaincre quelqu’un? Non, je vous l’assure. Même si elle explique une réalité.
Nous ne faisons que nous faire du bien, nous auto-convaincre, nous persuader de ce que nous savons déjà.
Pire encore, nous n’avons que peu de chance de gagner cette autre guerre, celle des médias.
Ce n’est pas faute de faire attention ou de dire la réalité.
Si la guerre n’était que militaire, tout serait réglé en quelques heures.
Mais c’est aussi une guerre des images, et elle est aussi importante, si ce n’est plus, car elle influence la réalité de l’intervention militaire.
Je suis convaincu que l’armée israélienne fait le nécessaire pour éviter les morts de civils, et ce pour plusieurs raisons: d’une part car ce sont les valeurs de base de l’état d’Israël (qu’elles soient systématiquement suivies sur le terrain est une autre question), d’autre part car les pertes civiles pour le gouvernement israélien rendent toujours plus difficile de pouvoir justifier de l’action contre le Hamas, le Djihad Islamique, etc. C’est une réalité, qu’elle nous plaise ou pas. L’intérêt militaire d’Israël est de ne pas avoir de morts de civils palestiniens.
Je suis tout aussi convaincu que ces mêmes organisations terroristes sont à la recherche de « la bavure », celle qui fournira les bonnes images pour montrer toute la « cruauté israélienne ». Les appels à la formation de boucliers humains en est la meilleure preuve, et cette fois, même dans les médias occidentaux, on en a parlé.
Malgré tout, même si l’on sait cela, rien ne pourra empêcher alors dans ce cas une empathie plus grande pour les Palestiniens.
C’est injuste, mais c’est aussi la réalité.
Dans une image montrant un soldat en uniforme et armé face à un gamin palestinien avec une pierre, vous aurez beau expliquer que l’armée protège des civils, que toute cette technologie sert à éviter des pertes israéliennes et même à minimiser les morts de civils palestiniens, et que ce gamin est manipulé par des organisations terroristes qui appellent à l’extermination des Juifs, la force de l’image annule tout esprit critique et logique.
C’est du marketing. C’est exactement la même chose lorsque Apple vous vend plus cher une technologie dépassée et moins innovante. Lorsque le premier Iphone est sorti, il était en 2G sans camera, alors même que sur le marché, il existait déjà de tels appareils. Mais c’est Apple. Apple, avec Steve Jobs, avait compris depuis longtemps que pour vendre un produit, il fallait retirer l’étape d’analyse pour aller directement vers l’émotionnel, je n’achète pas le produit le plus objectivement efficace, j’achète car j’aime. Les « Keynote » ne sont plus des présentations, mais sont décrits comme des messes. Ce n’est plus de la logique, mais de la foi. Exactement le même phénomène se retrouve lorsque des gens s’insultent littéralement sur internet pour savoir si la Xbox One est meilleure que la PS4. Ces marques ont réussi à faire sauter un étape, celle de la réflexion et de l’analyse.
Dans ce conflit, nous en sommes là.
Les visuels avec des chiffres, ou les petits films voulant résumer la situation en dessin animé sont dans ce sens parfaitement ridicules… Ils sont comme des Keynote d’Apple, donnant des chiffres que l’on veut croire à l’avance, qui peuvent même d’ailleurs être vrais.
Le marketing de ce conflit, du côté israélien, a voulu imiter le marketing émotionnel du côté palestinien.
Est-ce vraiment efficace?
Mais nous sommes aussi piégés par la vitesse de l’information, chaque info doit être courte, impactante et faire passer un message rapidement, sinon elle risque de passer à la trappe. C’est dans ce piège que l’on tombe, car ces messages, comme je l’ai dit plus haut, ne convainquent personne au fond.
La solution? Ouvrons les portes, laissons les journalistes prendre leur temps, regarder tout, rapporter tous les faits. Nous n’avons pas à avoir peur de la réalité, de l’analyse, y compris si l’on pointe nos propres défauts et faiblesses, car si nous sommes convaincus de notre droit, par les faits et non par les émotions pures, de notre droit à nous défendre, alors le reste du monde censé nous suivra… A condition que les journalistes disent tout…
N’oublions pas que c’est dans le calme et l’analyse qu’au final le rapport Palmer de l’Onu a reconnu le droit d’Israël et que c’est avec le recul que le juge Goldstone a reconnu les erreurs de son rapport.
Et si ce n’est pas le cas, tant pis, mais nous saurons au moins que notre défense ne se base pas que sur l’émotion et la réaction, mais sur une émotion résultant d’une vraie analyse des faits.
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