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Haverim boker tov ! Aujourd’hui je vais vous raconter une histoire dont on parle, hélas, trop peu. Si l’on cherche à comprendre et à analyser la musique Mizrahi, avec ses plus fameux représentants comme Kobi Perets ou Eyal Golan, on se rend compte que si la plupart des chansons parlent d’amour, elles ont ces accents nostlgiques si caractéristiques de l’orient. Ce qui me surprend finalement, c’est que l’on n’évoque presque jamais ce qui fait l’objet de cette nostalgie : Les pays d’origines de ces chanteurs de 2ème, voir 3ème génération de descendants des juifs venus des pays arabes.
Que l’on le veuille ou non il existe un lien culturel à la fois puissant et tabou entre les mizrahim et leurs pays d’origine, et pourtant, alors que l’on parle bien des juifs français, des juifs américains, des juifs russes, ou plus généralement des juifs d’Europe de l’Est, on entend jamais l’expression « Juifs Arabes ».
Et chers lecteurs, cela est tout à fait compréhensible. Étant donnée la situation actuelle, revendiquer une certaine inspiration judéo-arabe serait au mieux vu comme de la naïveté intellectuelle, au pire comme de la trahison.
Mais peut-on ignorer les siècles passés à vivre ensemble, dans des conditions pas toujours idéales, qui ont donné naissance à la langue judéo-arabe, et plus encore, à une culture (avec toutes les choses que ce mot peut englober), judéo-arabe ? Le plus célèbre des séfarades (avant ce cher Enrico bien sûr !), Maïmonide, n’écrivait-il pas son œuvre en judéo-arabe ? La poésie magnifique, sublime, grandiose de Yehuda Halevi n’était-elle pas écrite en judéo-arabe ?
Alors certes, c’était il y a bien longtemps, on en arrive même à se demander si « Que reste-t-il de nos amours ? » n’a pas été écrit simplement en souvenir de ce temps là ! (Entre nous je donnerais tout ce que j’ai pour entendre une verision mizrahi de cette chanson) !
Et pourtant, dans presque tous les pays arabes dans lesquels il y a eu un jour des juifs, ceux-ci ont contribué à la vie artistique, que ce soit en musique, en littérature, ou en films. D’ailleurs, nombreux encore sont les juifs mizrahim à chanter en arabe en Israël : « Ya Habibi Yallah » de Ishtar Alabina en est l’exemple le plus connu !
Le plus étonnant (enfin…) dans tout cela, c’est que cette nostalgie n’est peut-être pas le fait des juifs seulement. Non haverim, le plus étonnant c’est que les arabes aussi se languissent de notre départ.
Bah oui on avait l’argent alors forcément ça leur manque maintenant ils sont des meskin ! Regarde comme c’était beau et propre quand on était encore là bas et qu’il y avait les français !
Ce discours, je l’ai très souvent entendu, et pourtant il y a eu bien plus dans ces contrées lointaines, qu’une simple relation par intérêt. Le film égyptien « l’Immeuble Yacoubian » s’ouvrait sur une séquence qui montrait les différentes communautés, juives et autres, qui vivaient ensemble en Égypte jusqu’au coup d’État du Mouvement des Officiers Libres en 1952. Et tout le film est une réflexion pleine de nostalgie sur cette époque, dont les protagonistes ont la certitude qu’elle était celle d’une Égypte à la fois plus libre, plus propre, plus moderne et plus pluraliste.
Au Maroc, c’est le film « Où vas-tu Moshé ? » qui raconte l’histoire d’une communauté juive d’un village marocain, qui se voit obligée de partir pour Israël devant la montée des tensions. Là encore, il s’agit d’une vision nostalgique d’une époque lointaine qui semblait plus tolérante.
Et je dis bien qui semblait car le XXème siècle a vu de nombreuses attaques et pogroms contre ces mizrahim : 12 juifs tués à Shiraz en Iran en 1912, 51 la même année à Fez au Maroc, 25 en 1934 à Constantine en Algérie, et finalement 150 à Farhud en Irak pendant un pogrom de 3 jours en 1941.
La réalité bien sûr, est que les juifs ont souvent été réduits à un état de dhimmitude dans ces pays arabes, et qu’avec la création de l’État d’Israël, on leur a dit « Yallah ».
Mais il est bien aussi de se dire que certaines élites intellectuelles arabes, n’ont jamais oublié qu’un jour il a bien existé une véritable fusion culturelle entre eux et les juifs…
En attendant des jours meilleurs, je vous souhaite chers amis, une bonne journée pleine de soleil et de soldes pour ceux qui nous lisent depuis la France !